Des altérations des plateaux vertébraux en lien avec la lombalgie 


SPELKENS Rudy Modic
Entre la 2° et la 3°…

Le signe de Modic indique la présence de lésions du plateau vertébral lombaire à l’IRM. Ces lésions sont des défauts qui peuvent être ponctuels, angulaires, érosifs. La signification clinique de tels défauts reste inconnue.

Objectifs

Cette étude transversale s’est donnée pour objectif de déterminer la prévalence et la distribution de ces anomalies du plateau vertébral lombaire et de voir s’il existe une association entre leur présence et les rachialgies.  

Les patients 

Les sujets ont été sélectionnés de manière aléatoire dans une communauté typique de Hangzhou, dans l’est de la Chine, qu’ils soient rachialgiques ou pas.

Mesures

Chaque sujet a bénéficié un entretien structuré et une imagerie par résonance magnétique lombaire. 

Les antécédents de rachialgie, la présence éventuelle d’une rachialgie au cours des 4 dernières semaines, des 12 derniers mois et au cours de la vie, ont été notés. 

Les défauts de la plaque vertébrale, les signes de Modic, la dégénérescence discale ont été évalués en IRM. 

L’âge, le sexe et l’indice de masse corporelle (IMC en kg/m2), ainsi que les expositions au cours de la vie, y compris les antécédents de tabagisme, la conduite d’engins motorisés, les vibrations associées, les exigences physiques au travail ont été évalués.

Résultats 

478 sujets (53,3 ± 14,4 ans, étendue de 20 à 88 ans) ont été étudiés. 

Les défauts de plateaux vertébraux étaient présents chez 301 d’entre eux (63,0%), ce qui correspond à 842 défauts (soit 16,0% des plateaux vertébraux analysés). 

La présence de défauts des plateaux vertébraux, sans signe de Modic ni de dégénérescence discale, était associée à une rachialgie présente ou passée (OR = 1,64, P = 0,026). 

Des altérations focales et érosives étaient associés aux antécédents de rachialgie au cours de la vie (OR = 1,74-2,23, P <0,05 pour les deux), des altérations focales, érosives et angulaires étaient associés une rachialgie intense au cours des 12 derniers mois.

Conclusion 

Les altérations des plateaux vertébraux lombaires sont fréquemment retrouvés à l’IRM chez l’adulte. 

Elles sont associées aux rachialgies et pourraient être un facteur de risque indépendant du mal de dos. 

Commentaires

Note établie à partir du seul résumé. Si vous avez accès au texte intégral, merci de me faire part de toute inexactitude ou renseignement complémentaire.


Références bibliographiques

cov200hChen L, Battié MC, Yuan Y, Yang G, Chen Z, Wang Y. Lumbar vertebral endplate defects on Magnetic Resonance Images: Prevalence, distribution patterns, and associations with back pain. Spine J. 2019 Oct 25. pii: S1529-9430(19)31061-7. doi: 10.1016/j.spinee.2019.10.015. Article en pré-publication.

Articles en rapport avec le sujet

Le signe de Modic

Une caresse du temps

Note rédigée le Dimanche 10 Juin 2018

Cette étude transversale s’est donnée pour objectif de déterminer la prévalence et la distribution des signes de Modic lombaires et leurs associations avec la dégénérescence discale en utilisant un échantillon de la population générale chinoise.

Résumé des données connues

Des études antérieures ont rapporté que la prévalence de ces signes chez les Chinois de Hong Kong était beaucoup plus faible que dans les autres populations. De plus, leurs associations avec la dégénérescence discale nécessitaient une étude plus approfondie.

Matériaux & méthodes

L’échantillon comprenait 442 sujets (53,6 ± 14,9 ans, 20-88 ans) choisis au hasard dans une communauté chinoise typique.

Leurs rachis lombaires ont été analysés à l’IRM à la recherche de ce signe, de son type, de son emplacement et de sa taille pour en déterminer sa prévalence et ses modes de distribution.
La dégénérescence discale a été évaluée par ailleurs.

Résultats

Les signes de Modic se retrouvaient chez 209 (47,3%) sujets, soit 593 (12,2%) plateaux vertébraux.

84,1% (499) étaient de type II, 9,1% (54) étaient de type I et 6,4% (38) étaient mixtes.
Les 2/3 étaient présents dans le rachis lombaire inférieur, dont 44,9% au niveau du disque L5 / S1.

La plupart (73,9%) impliquaient les deux plateaux d’un segment vertébral.

Un âge plus avancé, avec un odds ratio (OR) de 2,44 pour chaque augmentation de 10 ans, (p <0,001) et un indice de masse corporelle – important je suppose – dans une moindre mesure (OR = 1,07, P = 0,016) étaient associés à la présence du signe, tout comme une dégénérescence discale adjacente (OR = 6,00, P <0,001), en tenant compte de l’âge et d’autres covariables.

Un âge plus avancé, l’indice de masse corporelle et une dégénérescence discale adjacente sont également associés à une plus grande taille des signes de Modic.

Conclusions des auteurs

Les signe de Modic sont courant en Chine continentale, avec une prédominance de type II. Ils sont principalement présents dans la région lombaire inférieure et ont tendance à se manifester sur les plateaux vertébraux adjacents. Ils sont fortement associés à l’âge et à la dégénérescence discale, ce qui suggère qu’ils puissent être des signes dégénératifs liés au vieillissement évoluant parallèlement à la dégénérescence discale.

Commentaires

Note établie à partir du seul résumé. Si vous avez accès au texte intégral, merci de me faire part de toute inexactitude ou renseignement complémentaire.


Références bibliographiques

Chen L, Hu X, Zhang J, Battié MC, Lin X, Wang Y.Modic Changes in the Lumbar Spine are Common Aging-related Degenerative Findings that Parallel With Disk Degeneration. Clin Spine Surg. 2018 May 25.

Résumé disponible en ligne

Articles en rapport avec le sujet

 

Le bacille de l’acné responsable de lombalgies discales ?

Oldies but goldies, quelques notes passent les années sans que leurs conclusions soient trop remises en cause… Ou pas. Je profite de l’été pour ce retour vers le (peut être) futur. Note rédigée originellement dans ActuKiné le Jeudi 23 Mai 2013

Sans titre
Signe de Modic à l’IRM. Image issue du site Rachis Toulouse

Les spondylodiscites sont depuis longtemps reconnues comme causes de lombalgies spécifiques. Des articles repris par le Figaro vont plus loin : une bactérie serait responsable de la dégénérescence discale, elle même cause potentielle de la lombalgie ; un traitement antibiotique pourrait alors traiter avec succès sur le long terme un tiers des lombalgies d’origine discale.

Essayons d’en savoir plus…

Ce qui est trouvé sur le site d’Atlantico, grâce aux nombreuses insomnies de Rémy Hignet et avant lui de Jean-Pierre, l’un de nos lecteurs signalant un article du Guardian :

« Mal de dos : une bactérie serait la responsable, ces souffrances pourraient être soignées par antibiotiques »

Une étude danoise a montré que la bactérie P. acnes était présente dans plus d’un tiers des cas de lombalgies chroniques avec hernie discale

Voici une bonne nouvelle pour les très nombreux français qui souffrent de mal de dos… Ces souffrances pourraient être dues à une bactérie, le Propionibacterium acnes (P. acnes). Une étude danoise révèle que cette bactérie serait présente dans plus d’un tiers des cas de lombalgie chronique avec hernie discale. Les douleurs pourraient donc être traitées avec des antibiotiques, explique mardi Le Figaro.

L’étude a été menée auprès de 61 patients qui allaient subir une intervention chirurgicale pour une hernie discale. Ces derniers souffraient surtout de douleurs lombaires depuis plus de six mois et l’examen IRM de leur colonne vertébrale montrait un aspect caractéristique que les radiologues appellent Modic 1.

Dans quatre cas sur dix, la biopsie a révélé la présence du germe P. acnes, une bactérie très courante sur la peau humaine – notamment en cas d’acné -, mais qui vient parfois, étonnamment, se loger dans la colonne vertébrale.

Et qui dit bactérie, dit antibiotique. Et ça marche ! Les chercheurs danois ont donné à leurs patients de l’amoxicilline et de l’acide clavulanique. Résultat : les douleurs sont moins fréquentes et moins fortes. Après un an de traitement, seuls 19 % des patients souffrent encore. »

Si vous êtes lecteur régulier d’ActuKiné, vous n’en êtes pas à la première découverte d’un procédé sensé guérir la lombalgie. A la lecture du Guardian, si ces faits s’avèrent vrais, les chirurgiens du rachis (et les kinés, ostéopathes et tutti quanti…) pourraient bientôt pointer au chômage et les auteurs de l’article postuler pour le prix Nobel de médecine…

Tentative de décryptage :

Il s’agit de lombalgies pour lesquelles une dégénérescence discale a été mise en évidence et dans laquelle un signe de Modic a été retrouvé à l’IRM. Parmi ces dégénérescences discales, certaines seraient liées à la présence (et bien sûr non forcément causées par) d’une bactérie retrouvée dans du matériel chirurgical.

Première question : est-ce que toutes les lombalgies sont d’origine discale ?

Question la plus évidente, mais pas la réponse la plus facile. La dégénérescence discale et la lombalgie accompagnant l’âge, il est possible de trouver une liaison entre dégénérescence discale et lombalgie, mais la causalité n’est pas toujours au rendez-vous. Bogduk indique cependant qu’il est admis aujourd’hui que la lombalgie d’origine discale représente entre 25 et 43 % des lombalgies.

«Cette bactérie serait présente dans plus d’un tiers des cas de lombalgie chronique avec hernie discale» ce qui fait, selon les chiffres de Bogduk, au mieux entre 10 et 15 % des lombalgies, ce qui est déjà pas mal.

Mais les auteurs ont sélectionné 61 patients lombalgiques souffrant depuis plus de 6 mois et avec la présence d’un signe de Modic 1 à l’IRM. La fenêtre de tir se resserre. Combien, parmi ces 10 à 15% de lombalgiques présentent ces caractéristiques ?

Deuxième question : le signe de Modic, késaco ?

Une mise au point [1] et un éditorial [2] en français et en accès libre sont disponibles sur le sujet.

Il s’agit de modifications des plateaux vertébraux visibles à l’IRM. Trois types sont décrits selon que sont retrouvés de l’oedème (Modic 1), une involution graisseuse (Modic 2), une ostéosclérose, beaucoup plus rare (Modic 3). La contemporanité avec une lombalgie ou l’aggravation d’une lombalgie commune (Modic 1) suggère un lien causal.

Le traitement par immobilisation ou anti-inflammatoire serait alors le traitement de choix lors de ce que l’auteur appelle une discopathie destructrice rapide, provoquant une lombalgie très invalidante.

Une étude longitudinale [6] parue dans Spine en 2006 avait étudié la prévalence du signe de Modic et ses modifications sur 3 ans, chez 60 patients souffrant de sciatique, non-opérés. Elle indique la forte prévalence du signe de Modic dans les lombalgies présentant des dégénérescences discales (22 à 50%), montre qu’ils peuvent passer d’un type 1 à 2, 2 à 3, mais aussi revenir à la normale, les signes étant aussi corrélés à l’âge du patient.

Troisième question : est-ce que bactérie et signe de Modic sont liés ?

Une étude strasbourgeoise [3] portant sur l’analyse du matériel discal retiré après chirurgie pour hernie discale lombaire retrouve (lecture du résumé seul) chez 83 patients la présence de 40 disques infectés, dont le Propionibacterium acnes (bactérie impliquée dans l’acné) chez 18 d’entre eux sans relation significative avec le signe de Modic. Il reste à déterminer si ces germes ne sont pas non plus présents chez des sujets sains…

Une des études danoises reprise dans les articles de vulgarisation [4] a elle aussi cherché à savoir la prévalence des infections discales dans le matériel retiré et à déterminer si les patients porteurs d’un disque infecté présentaient un signe de Modic.

Ses résultats sont contradictoires avec l’étude précédente.

Ce signe (Modic 1) est présent pour eux dans 6 % de la population générale et 35 à 40 % des lombalgiques. La présence du Propionibacterium acnes se retrouve chez 7 à 53 % des patients. Chez les patients infectés, 80 % d’entre eux ont développé un signe de Modic 1 dans la vertèbre adjacente, mais aucun signe chez les patients aux disques indemnes de présence bactérienne.

Quatrième question : est-ce que le traitement antibiotique est efficace sur les lombalgies d’origine discale ?

La deuxième étude danoise portant sur 162 patients [5], contrôlée randomisée en double aveugle sur le long-terme, assure que oui. Chez des patients lombalgiques chroniques (plus de six mois de lombalgie), après hernie discale et présence d’un signe de Modic 1 à l’IRM sur la vertèbre adjacente à la hernie discale.

Les résultats apparaissent significativement plus importants avec le traitement par antibiotique  (Bioclavid) qu’avec le placebo.

In fine, qu’en conclure ?

Un patient souffrant depuis longtemps d’une lombalgie, avec des douleurs invalidantes, doit pouvoir bénéficier d’une IRM afin de déterminer la présence contiguë d’un signe de Modic 1 et d’une hernie discale. Dans ce cas, un traitement par antibiotique pourrait être envisagé. Le prix modique du traitement devrait compenser les IRM de dépistage systématiques…mais les antibiotiques, c’est pas automatique…

La fin de ce nouveau feuilleton n’est pas pour tout de suite…Votre avis ?

Un point de vue différent :

Les deux commentaires retrouvés par Yannick Barde-Cabusson [7,8] critiquent un recrutement différent (le signe de Modic n’apparait pas clairement identique dans les deux groupes), un groupe placebo étonnamment peu ou pas amélioré (sous-entendu des données «bidonnées»), un conflit d’intérêt potentiel puisque l’un des auteurs l’est aussi d’un site promoteur de cette approche…et susceptible d’en tirer profit.


Références bibliographiques :

[1] Bertrand Bordet, Julien Borne, Olivier Fantino, Jean-Christophe Bousquet, Sylvie Coillard. Analyse IRM selon Modic : intérêt dans les lombalgies. Résonances Européennes du Rachis. Volume 13 n° 40. Page 1650

Article disponible en ligne

[2] Johann Beaudreuil, Philippe Orcel. La discopathie de type Modic 1. Revue du Rhumatisme 76 (2009) 4–6

Article disponible en ligne

[3] Arndt J, Charles YP, Koebel C, Bogorin I, Steib JP. Bacteriology of degenerated lumbar intervertebral disks. J Spinal Disord Tech. 2012 Oct;25(7):E211-6.

sumé de l’article disponible en ligne

[4] Hanne B. Albert, Peter Lambert, Jess Rollason, Joan Solgaard Sorensen, Tony Worthington, Mogens Bach Pedersen, Hanne Schack Nørgaard, Ann Vernallis, Frederik Busch, Claus Manniche. Does nuclear tissue infected with bacteria following disc herniations lead to Modic changes in the adjacent vertebrae? European Spine Journal. April 2013, Volume 22, Issue 4, pp 690-696

sumé de l’article disponible en ligne

[5] Hanne B. Albert, Joan S. Sorensen, Berit Schiott Christensen, Claus Manniche. Antibiotic treatment in patients with chronic low back pain and vertebral bone edema (Modic type 1 changes): a double-blind randomized clinical controlled trial of efficacy. European Spine Journal. April 2013, Volume 22, Issue 4, pp 697-707

sumé de l’article disponible en ligne

[6] Mari Kuisma et al. A Three-Year Follow-up of Lumbar Spine Endplate (Modic) Changes. Spine. 2006;31(15):1714-1718.

Article disponible en ligne

[7] Neil O’Connell. Clean teeth, bad back? Antibiotics for chronic low back pain.

Sur le site BodyInMind

[8] Margaret McCartney. Antibiotics for back pain: hope or hype? BMJ 2013;346:f3122

Article disponible en ligne

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